Page:Daudet - L'Évangéliste, 1883.djvu/49

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doigts, avec des phrases arrondies, des ondulements d’épaules, de fins sourires entendus effleurant la solennité du visage régulier et hautain. Mme Ebsen et sa mère étaient éblouies.

Éline, elle, tout en trouvant M. Lorie un peu phraseur, resta touchée de l’accent ému et simple dont il mentionna la mort de sa femme, tout bas, très vite, avec une voix enrouée qui ne semblait plus du même homme. Elle s’apercevait aussi à certains détails de toilette chez la petite fille, qu’on avait mise pourtant dans son plus beau, aux reprises du col brodé, au ruban reteint du chapeau, que malgré les belles phrases du père, ils ne devaient pas être bien riches ; et sa sympathie s’augmentait de cette misère devinée qu’elle n’aurait jamais crue aussi complète, aussi profonde.

Quelques jours après cette visite, Sylvanire vint sonner tout éperdue chez ces dames, Fanny était malade, très malade. Ça l’avait prise subitement ; et la bonne en l’absence de son maître s’adressait dans son épouvante aux seules personnes qu’elle connût. Éline descendit bien vite avec sa mère, et toutes deux restèrent saisies du dénuement lugubre des trois pièces sans feu,