Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/190

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hissé sur le cheval de son domestique. Puis on se mit en route. La bande avait hâte de s’éloigner de l’endroit où l’arrestation venait d’avoir lieu. La Haye Saint-Hilaire s’aperçut tout à coup que l’évêque avait conservé ses bas violets. Craignant que cette circonstance le fît reconnaître par les gens qu’on rencontrerait, il envoya un de ses hommes acheter des bas blancs dans une maison située près de là. Mais quand on les eut passés aux jambes du cavalier, on ne put lui remettre ses souliers. Il fallut renoncer à compléter son travestissement.

On repartit aussitôt. Jusque vers le milieu de l’après-midi, on ne fit que tourner dans la banlieue de Vannes, d’où La Haye Saint-Hilaire ne voulait pas s’écarter. Ces circuits étaient coupés de haltes, sous les bois, dans des chemins creux, dans des champs de genêts, partout où l’on pouvait se reposer sans être vu. Pendant une de ces haltes, dans le bois de l’Ermitage, il y eut une alerte. Des coups de fusil et des cris se firent entendre. C’étaient des gendarmes. Avertis par le maire de Monterblanc, ils s’étaient mis à la recherche des bandits. Ceux-ci sautèrent sur leurs armes. Sourds aux supplications de l’évêque qui leur offrait d’aller au-devant des assaillants et de les contenir pendant qu’eux-mêmes s’enfuiraient, ils le contraignirent à remonter à cheval et l’entraînèrent.

On courut ainsi pendant une demi-heure. Il ne se tenait à cheval qu’avec l’aide de l’abbé Jarry et de La Haye Saint-Hilaire qui couraient à ses côtés. Non loin du village de Lange, on s’arrêta dans un champ de genêts très hauts. On étendit l’évêque sur des broussailles, la selle du cheval lui servit d’oreiller et, tandis qu’abrité par un parasol que son secrétaire tenait ouvert, il reprenait haleine, toute la bande, brisée de