Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/218

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Le général Antonio eut bientôt choisi les individus qui devaient former sa troupe. Après s’être efforcé en vain de faire revenir Lanoë sur sa détermination, il renonça à le convertir. Il fut plus heureux en s’adressant à Fierlé. Moyennant argent, celui-ci s’engagea à exécuter aveuglément, quels qu’ils fussent, les ordres qui lui seraient donnés. Antonio lui adjoignit successivement divers individus au nombre de sept, anciens chouans, déserteurs pour la plupart, déjà désignés à ce titre à la gendarmerie et qui n’avaient pas grand’chose à perdre, du moins ils le croyaient, à s’aventurer dans cette équipée.

L’un d’eux, un tisserand nommé Harel, avait été précédemment complice d’Antonio, en 1804, dans une très dramatique affaire, la mise à sac d’une maison appartenant à un ancien terroriste du pays, un octogénaire auquel ils avaient enlevé une somme de seize mille francs. Invité par Antonio à s’unir de nouveau à lui pour une attaque à main armée contre la recette du Trésor, Harel hésita avant de s’engager.

– La voiture aura une escorte qui sera plus forte que nous, répondit-il aux premières ouvertures d’Antonio. Je ne veux pas recevoir des coups et je refuse.

– Il n’y aura pas d’escorte, affirma Antonio.

– N’empêche qu’à participer à cette tentative, on court risque de la guillotine.

– La guillotine ! allons donc. Avant qu’on ait eu le temps de la remonter, l’armée anglo-russe aura débarqué et la contre-révolution sera victorieuse.

Convaincu par ce langage, Harel se laissa inscrire parmi les combattants. Les autres, bien que plus tard ils aient essayé de démontrer qu’on les avait enrôlés de force, résistèrent moins que lui. Du reste, ils appartenaient à la plus basse lie du peuple et comptaient tous