Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/239

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

que si elle ne répondait pas avec franchise ». On en était encore à la croire uniquement victime de l’obéissance filiale.

Ce n’est qu’ainsi que se peuvent expliquer les ménagements, au moins bizarres, dont le préfet usa vis-à-vis d’elle. Au lieu de la faire venir chez lui, il se transporta à Falaise, chez le maire, M. de Saint-Léonard, allié à la famille de Combray. C’est là qu’en présence de Mme de Saint-Léonard, il la reçut et l’interrogea. Dans une première entrevue, elle garda la même attitude qu’en présence de M. Le Couturier. Mais son embarras et son trouble étaient si visibles, que M. Caffarelli cessa soudain de croire à son innocence.

– Vous ne me dites pas la vérité, observa-t-il. Vous avez tort. Dans votre intérêt, vous feriez mieux de me la dire.

Et comme elle protestait, il ajouta :

– Je vous donne jusqu’à demain pour réfléchir. Ne m’obligez pas à sévir contre vous.

Elle le quitta terrifiée. Elle se sentait perdue, bien qu’elle ignorât encore l’arrestation de Le Chevallier. Tout porte à croire que c’est ce jour-là qu’elle tenta de s’empoisonner. Il fut fait allusion dans le procès à cette tentative par le gendarme Chauvel. Il avoua que Mme Aquet de Férolles avait résolu de se donner la mort et qu’il eut le plus grand mal à lui arracher le poison qu’elle était parvenue à se procurer. À ce trait qui met si vivement en relief tout ce qu’on sait déjà du caractère de leurs relations, on devinera sans peine en quel état de détresse morale elle était le lendemain quand elle se présenta, de nouveau, devant le préfet.

Cette détresse se traduisit par des aveux. Elle y mêla beaucoup de réticences. Néanmoins, elle en dit assez pour justifier les mesures de rigueur que M. Caffarelli