Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/250

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Chauvel se résigne à la séparation dont elle a pris l’initiative. Par ses ordres, il va retenir une place pour elle à la diligence de Rouen. À ce moment, arrive Le Marchand, l’aubergiste de Louvigny, qu’elle a mandé afin de l’envoyer chez Joseph Buquet chercher un peu d’argent, en vue du voyage qu’elle est au moment d’entreprendre.

– Ne partez pas, madame, lui dit Le Marchand. Je vous ai trouvé un logement chez un ami de M. Armand, où vous pourrez rester sans danger aussi longtemps que vous voudrez.

Cet ami, c’est Vanier de la Chauvinière, l’avoué chez qui ont été transportées en partie les sommes retirées de chez Buquet. Quoiqu’elle ne l’ait jamais vu, elle le connaît pour en avoir souvent entendu parler par Le Chevallier. Elle accepte avec reconnaissance l’hospitalité qui lui est offerte. Rendez-vous est pris pour le même soir sur la promenade de Saint-Julien, où l’avoué viendra la chercher accompagné de Bureau de Placène, qui ne se doute pas qu’à quelques jours de là il sera arrêté. À la tombée de la nuit, elle arrive seule sous les ombrages de Saint-Julien. La promenade est déserte à cette heure. Sur un banc, deux messieurs sont assis. Elle va s’asseoir à côté d’eux. Alors, l’un dit à l’autre :

– C’est sûrement la personne que nous venons chercher.

Elle se nomme ; ils se nomment aussi. La connaissance faite, Bureau de Placène s’éloigne, et Vanier de la Chauvinière la conduit dans sa maison où personne ne songera à soupçonner sa présence. Dès le lendemain, elle y reçoit Lanjalley, Chauvel et Mallet. Mais si l’appui que lui donnent ceux-ci est désintéressé, il n’en est pas de même de celui qu’elle reçoit de Vanier de la Chauvignière et de Bureau de Placène. À l’instigation de Le