Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/269

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Avant d’aller au supplice, il écrivit son testament. Nous l’avons sous les yeux. Il révèle une âme haute et fière : « Ma sœur, je vais mourir et je vous lègue mon fils. Le seul reproche que je m’adresse en quittant la vie, victime de l’injustice des hommes, c’est de ne lui avoir pas conservé la fortune que j’avais reçue de mes parents. Élevez-le suivant ses moyens. Faites-en un artisan ou un marchand. Faites-en surtout un honnête homme. Qu’il ne fasse jamais ce que les lois défendent et qu’il fasse toujours ce qu’elles ordonnent tant que ces lois ne sont pas celles de l’anarchie contre le souverain ou celles de la tyrannie contre le peuple. Qu’il respecte toutes les religions et observe celle dans laquelle il est né. Mais qu’on lui apprenne de bonne heure à distinguer la morale du dogme et le dogme du prêtre. » L’homme qui tient ce langage pouvait avoir été égaré par la passion politique, par l’habitude de l’indiscipline. Ce n’était pas un malfaiteur.


X

Commencée en novembre 1807, l’instruction judiciaire se poursuivit à Rouen pendant toute la durée de l’année 1808. Il eût été facile d’en abréger les lenteurs et de la clore en un délai moins long. Mais la justice ne tenait pas à se hâter. Elle conservait encore l’espoir de s’emparer du vicomte d’Aché, de ce farouche Alain dit Antonio, qu’elle considérait comme les principaux coupables et qu’elle soupçonnait d’avoir participé aux mouvements insurrectionnels du Morbihan, à l’audacieux enlèvement de l’évêque de Vannes dont l’auteur, le chevalier de La