Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/324

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se mit à sa poursuite. Il fut atteint et tué au moment où il venait de s’emparer d’une barque et d’y monter. Ordre fut aussitôt envoyé sur toute la côte de désarmer chaque soir les bateaux pêcheurs et d’en enlever les agrès. De cette manière, personne ne pourrait plus s’enfuir. Chateaubriand dut attendre encore. On touchait au 15 décembre.

À cette date, le bateau qui l’avait amené en septembre courait des bordées en vue de Saint-Cast. Une tempête se déchaîna, le jeta à la côte. Les douaniers veillaient. Ils arrêtèrent l’équipage, y compris Quintal. Ainsi, la mauvaise fortune semblait s’acharner contre Chateaubriand, préparer sa perte. Il recourut encore aux services de Chauvel. Mais celui-ci, alarmé par l’arrestation de Quintal, ne voulait plus s’exposer aux périls qu’il avait affrontés déjà. Il ne s’engagea qu’à trouver un matelot pour conduire Chateaubriand à Jersey.

Le 6 janvier 1809, veille de la fête des Rois, le hasard lui fit rencontrer un cultivateur des environs de Saint-Cast, nommé Depagne.

– Je suis bien aise de te voir, lui dit-il. Veux-tu gagner cent écus ?

– Que faut-il faire ?

– Passer un monsieur à Jersey ; c’est un honnête homme. Il n’y a rien à craindre.

– Mais je ne connais pas la navigation.

– Ça ne fait rien. Il ne s’agit que de nager. Lui connaît le compas. Il te fera ensuite rentrer en France. En attendant, tu auras un écu par jour, en sus du prix convenu.

– Je consens, répondit Depagne.

C’est en ces conditions que, d’après son témoignage lors de l’instruction judiciaire, il fut engagé. Chauvel ajouta :