Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/338

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un dans le Morbihan ; d’Andigné attendait son brevet de général et ainsi de la plupart des autres. Tous ou presque tous se trouvaient donc, au moment où se répandait, à travers la France la nouvelle du retour de l’Empereur, dans des situations qui les désignaient naturellement pour marcher à sa rencontre ou pour organiser la résistance contre lui, dans les pays où, durant tant d’années, ils avaient combattu en faveur des Bourbons.

Cette nouvelle arriva à Paris dans la soirée du 5 mars. Le comte de Suzannet se rendit aussitôt aux Tuileries afin de suggérer à Louis XVIII l’idée de confier aux populations de l’Ouest, en se transportant au milieu d’elles, le soin de le défendre et de défendre son trône. Mais, aux Tuileries, tout était en désarroi. Suzannet ne put avoir accès auprès du souverain. Il fut reçu par le duc de Duras, gentilhomme de la chambre. Il apprit de sa bouche que le duc de Bourbon était envoyé dans l’Ouest avec le prince de La Trémoille comme major général pour y prendre les mesures que commandaient les circonstances. Quant à lui, on l’invitait à se rendre sur-le-champ dans le Poitou. Pour tout ce qui concernait l’organisation de la défense, le roi s’en rapportait à sa prudence et à son zèle.

Aucun des anciens chouans qui vinrent, en ces heures de suprême péril, offrir leur épée ne reçut de réponse plus précise. Le duc d’Angoulême était mis à la tête des armées du Midi, le duc de Bourbon partait pour l’Ouest, mais non en vue de l’exécution d’un plan d’ensemble, combiné d’avance. Chacun s’en allait de son côté, sans instructions formelles, la bride sur le cou. Personne, même parmi les plus qualifiés, ne voulait donner des ordres ni même prendre une responsabilité. On eût dit que le péril qui venait d’éclater n’existait pas.

Michelot-Moulin raconte dans ses mémoires que, se