Page:Daudet - La Police et les chouans sous le Consulat et l’Empire, 1895.djvu/78

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1800 le tragique épisode de la machine infernale modifia les dispositions du premier Consul, d’abord bienveillantes. D’innombrables arrestations eurent lieu. Les prisons s’emplirent de gens dont le seul crime consistait à professer des opinions royalistes et à les avoir défendues jadis, le fusil à la main. On les traita comme des condamnés, encore qu’aucun jugement n’eût été rendu contre eux.

Entre ceux qu’on arrêta les premiers, se trouvaient Bourmont, Suzannet et d’Andigné. Pendant les campagnes de Vendée, tous trois avaient eu des commandements dans les bandes insurgées. Après l’élection de Bonaparte, c’est d’Andigné que les chefs chouans avaient choisi pour venir négocier la paix à Paris. Cette négociation avait laissé dans l’esprit de Bonaparte d’assez vives préventions contre lui. Il était trop entier dans ses idées, trop peu simple pour plaire au premier Consul. Son arrestation, comme celles de Bourmont et de Suzannet, fut le contre-coup des rancunes qui survivaient dans l’esprit de Bonaparte à ses rapports avec eux.

Bourmont fut arrêté à Paris en compagnie de son aide de camp Hingant de Saint-Maur, Suzannet et d’Andigné dans leurs terres. Bientôt après, tous quatre se retrouvaient au Temple. On les y retint durant quelques semaines. Puis, en juillet 1801, ils furent transférés à Dijon d’où on les dirigea, Bourmont et Hingant de Saint-Maur sur la citadelle de Besançon, d’Andigné et Suzannet sur le fort de Joux qui domine la petite ville de Pontarlier et la frontière suisse.

D’Andigné et Suzannet étaient des hommes énergiques, dans la vigueur de l’âge. Suzannet avait vingt-neuf ans, d’Andigné trente-six. Celui-ci était un ancien officier de la marine royale. Préparés aux aventures périlleuses par la dure vie qu’ils avaient menée jusque-