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LES DEUX AUBERGES.

La belle Margoton
Tant matin s’est levée,
A pris son broc d’argent,

À l’eau s’en est allée…


… L’auberge d’en face, au contraire, était silencieuse et comme abandonnée. De l’herbe sous le portail, des volets cassés, sur la porte un rameau de petit houx tout rouillé qui pendait comme un vieux panache, les marches du seuil calées avec des pierres de la route… Tout cela si pauvre, si pitoyable, que c’était une charité vraiment de s’arrêter là pour boire un coup.




En entrant, je trouvai une longue salle déserte et morne, que le jour éblouissant de trois grandes fenêtres sans rideaux fait plus morne et plus déserte encore. Quelques tables boiteuses où traînaient des verres ternis par la poussière, un billard crevé qui tendait ses quatre blouses comme des sébiles, un divan jaune, un vieux comptoir, dor-