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VIII

REGAIN DE JEUNESSE


Le ministre et sa femme achevaient de déjeuner dans leur salle à manger du premier étage, pompeuse et trop vaste, que ne parvenaient pas à dégeler l’épaisseur des tentures, les calorifères chauffant tout l’hôtel, ni le fumet d’un copieux repas. Ce matin-là, par hasard, ils étaient seuls. Sur la nappe, parmi la desserte toujours très fournie à la table du Méridional, il y avait sa boîte à cigares, la tasse de verveine qui est le thé des Provençaux, et de grands casiers alignant les fiches multicolores où étaient inscrits les sénateurs, députés, recteurs, professeurs, académiciens, gens du monde, la clientèle ordinaire et extraordinaire des soirées ministérielles, — quelques cartons plus hauts que les autres, pour les invités privilégiés, imposés à la première série des « petits concerts ». Madame Roumestan les feuillait, s’arrêtait à certains noms, surveillée du coin de l’œil par Numa qui,