Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/140

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ous les nouveaux engagements qu’il venait de prendre, il parut épouvanté.

« Allons, allons… On vous sait gré tout de même. »

Elle le quitta avec le sourire des anciens jours, toute légère de sa bonne action, heureuse aussi peut-être de sentir s’agiter en son cœur quelque chose qu’elle croyait mort depuis longtemps.

« Ange, va ! » fit Roumestan qui la regardait s’en aller, ému, les yeux tendres ; et comme Méjean rentrait l’avertir pour le conseil :

« Voyez-vous, mon ami, quand on a le bonheur de posséder une femme pareille… le mariage, c’est le paradis sur la terre… Dépêchez- vous vite de vous marier. »

Méjean secoua la tête, sans répondre.

« Comment ! Vos affaires ne vont donc pas ?

— Je le crains bien. Madame Roumestan m’avait promis d’interroger sa sœur, et comme elle ne me parle plus de rien…

— Voulez-vous que je m’en charge ? Je m’entends à merveille, moi, avec ma petite belle-soeur. Je parie que je la décide… »

Il restait un peu de verveine dans la théière. Tout en se versant une nouvelle tasse, Roumestan s’épanchait en protestations pour son chef de cabinet. Ah ! les grandeurs ne l’avaient pas changé. Méjean était toujours son excellent, son meilleur ami. Entre Méjean et Rosalie, il se sentait plus solide, plus complet…

« Ah ! mon cher, cette femme, cette femme !… Si vous saviez ce qu’elle a été bonne, pardonnante… Quand je pense que j’ai pu… »