Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/186

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Parisiennes. Même après leur sortie du pensionnat, elle restait sa petite mère. Et maintenant elle s’occupait de la marier, de lui trouver le compagnon tranquille et sûr, indispensable à cette tête folle, le bras solide dont il fallait équilibrer ses élans. Méjean était tout indiqué ; mais Hortense, qui d’abord n’avait pas dit non, montrait subitement une antipathie évidente. Elles s’en expliquèrent au lendemain de cette soirée ministérielle où Rosalie avait surpris l’émotion, le trouble de sa sœur.

— Oh ! il est bon, je l’aime bien, disait Hortense… C’est un ami loyal comme on voudrait en sentir auprès de soi toute sa vie… Mais ce n’est pas le mari qu’il me faut.

— Pourquoi ?

— Tu vas rire… Il ne parle pas assez à mon imagination, voilà !… Le mariage avec lui, ça me fait l’effet d’une maison bourgeoise et rectangulaire au bout d’une allée droite comme un i. Et tu sais que j’aime autre chose, l’imprévue, les surprises…

— Qui alors ? M. de Lappara ?…

— Merci ! pour qu’il me préfère son tailleur.

— M. de Rochemaure ?

— Le paperassier modèle… moi qui ai le papier en horreur.

Et l’inquiétude de Rosalie la pressant, voulant savoir, l’interrogeant de tout près : « Ce que je voudrais, dit la jeune fille, pendant que montait une flamme légère, comme d’un feu de paille, à la pâleur de son teint, ce que je voudrais… » puis, la voix changée, avec une expression comique :

— Je voudrais épouser Bompard ; oui, Bompard, voilà