Page:Daudet - Numa Roumestan, Charpentier, 1881.djvu/220

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traité de cinq ans, de gros appointements, des feux, la vedette, le tout stipulé sur papier timbré, et non par la simple poignée de main, le « topez là » de Cadaillac. Elle n’y croyait pas plus qu’aux « J’en réponds… c’est comme si vous l’aviez… » dont Roumestan depuis cinq mois essayait de la leurrer.

Celui-ci se trouvait entre deux exigences. « Oui, disait Cadaillac, si vous renouvelez mon bail. » Or le Cadaillac était brûlé, fini ; sa présence à la tête du premier théâtre de musique, un scandale, une tare, un héritage véreux de l’administration impériale. La presse réclamerait sûrement contre le joueur, trois fois failli, qui ne pouvait porter sa croix d’officier, et le cynique montreur, dilapidant sans vergogne les deniers publics. Fatiguée à la fin de ne pouvoir se laisser prendre, Alice cassa la ligne et se sauva, traînant l’hameçon.

Un jour, le ministre arrivant chez les Bachellery trouva la maison vide et le père qui, pour le consoler, lui chantait son dernier refrain :

Donne-moi d’quoi q’t’as, t’auras d’quoi qu’j’ai.


Il s’efforça de patienter un mois, puis retourna voir le fécond chansonnier qui voulut bien lui chanter sa nouvelle :

Quand le saucisson va, tout va…

et le prévenir que ces dames, se trouvant admirablement aux eaux, avaient l’intention de doubler leur séjour. C’est alors que Roumestan s’avisa