Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/201

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de discussions politiques arrivaient du salon ; et toujours le crépitement de la pluie sur les vitres, sur le toit de zinc, toujours le gargouillement des gouttières en cascades.

Entre temps, Costecalde continuait ses sourdes menées, le jour dans son cabinet de directeur des cultures, le soir en ville, dans le salon commun, avec ses âmes damnées Barban et Rugimabaud, qui l’aidaient à répandre les bruits les plus sinistres, celui-ci entre autres « L’ail va manquer !… »

Et quelle consternation de penser qu’un jour prochain on serait peut-être privé de cet ail sauveur, guérisseur, de cette panacée universelle gardée dans les magasins du Gouvernement, à qui Costecalde reprochait de l’accaparer.

Excourbaniès, — et de quels tonitruements ! — soutenait la calomnie du directeur des cultures. Il y a un vieux proverbe tarasconnais qui dit « Larrons de Pise, le jour se battent entre eux, et la nuit volent ensemble. » C’était bien le cas de cet Excourbaniès à double face, qui, devant Tartarin, au Gouvernement, parlait contre Costecalde, tandis qu’en ville, le soir, il faisait chorus avec les pires ennemis du Gouverneur.