Page:Daudet - Port-Tarascon, 1890.djvu/232

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près d’eux, il s’était élancé à la rencontre des Anglais, prêt à danser devant le vainqueur une bamboula frénétique.

Mais l’officier de Sa Gracieuse Majesté, sans prendre garde à ce fantoche, marcha droit vers Tartarin et demanda en anglais :

« Quelle nation ? »

Branquebalme, qui comprenait, répondit dans la même langue « Tarasconnais. »

L’officier ouvrit des yeux ronds comme des assiettes à ce nom de peuple qu’il n’avait jamais vu sur aucune carte marine, et demanda plus insolemment encore :

« Que faites-vous dans cette île ? De quel droit l’occupez-vous ? »

Branquebalme, interloqué, traduisit la demande à Tartarin, qui commanda « Répondez que l’île est à nous, Cicéron, qu’elle nous a été cédée par le roi Négonko, et que nous avons un traité en bonne forme. » Branquebalme n’eut pas besoin de continuer son rôle d’interprète. L’Anglais se tourna vers le Gouverneur et dit en excellent français :

« Négonko ? Connais pas… Il n’y a pas de roi Négonko… »