Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/148

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

avait entraîné la blonde Marthe, un peu molle et douce, ressemblant à sa mère et à son frère.

Mais quelle gêne odieuse, pendant qu’il était à remuer ses souvenirs, que ces innocentes câlineries d’enfants se frottant au parfum coquet que mettait sur lui la lettre de sa maîtresse.

— Non, laissez-moi… il faut que je travaille…

Et il rentrait avec l’intention de s’enfermer chez lui, quand la voix de son père l’appelait au passage.

— C’est toi, Jean… écoute donc…

L’heure du courrier apportait de nouveaux sujets de morosité à cet homme déjà sombre de nature, gardant de l’Orient des habitudes de solennité silencieuse, coupée de brusques souvenirs…, « quand j’étais consul à Hong-Kong », qui partaient en éclats de souches au grand feu. Pendant qu’il écoutait son père lire et discuter ses journaux du matin, Jean regardait sur la cheminée la Sapho de Caoudal, les bras aux genoux, sa lyre à côté d’elle, TOUTE LA LYRE, un bronze acheté il y avait vingt ans, lors des embellissements de Castelet ; et ce bronze du commerce, qui l’écœurait aux vitrines parisiennes, lui donnait ici,