Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/184

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mots de froide politesse au jeune homme, des ordres à Fanny d’une voix sifflante, la barque s’éloigna chargée de cris, d’un train de dispute que termina un insultant éclat de rire apporté aux deux amants par la sonorité de l’eau.

— Tu entends, tu entends, disait Fanny blême de rage, c’est de nous qu’elle se moque…

Et toutes ses humiliations, toutes ses rancœurs lui remontant à cette dernière injure, elle les énumérait en regagnant la gare, avouait même des choses qu’elle avait toujours cachées. Rosa ne cherchait qu’à l’éloigner de lui, qu’à faciliter des occasions de le tromper.

— Tout ce qu’elle m’a dit pour me faire prendre ce Hollandais… Encore tout à l’heure elles s’y sont mises toutes… Je t’aime trop, tu comprends, ça la gêne pour ses vices, car elle les a tous, les plus bas, les plus monstrueux. Et c’est parce que je ne veux plus…

Elle s’arrêta, le vit très pâle, les lèvres tremblantes, comme le soir où il remuait le fumier aux lettres.

— Oh ! ne crains rien, dit-elle… ton amour