Page:Daudet - Théâtre, Lemerre, 1889.djvu/309

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non voulez-vous que je vous dise ? Tous ces peintraillons de maintenant n’ont qu’une idée dans la tête, gagner de l’argent !… plus de dignité, plus de conscience… Les pavillons chinois sont bien payés, va pour les pavillons chinois… Ah ! jeunes gens, jeunes gens, vous vous êtes moqués de nos grands cheveux et de nos chapeaux d’astrologues, vous avez répudié la vareuse, la sainte vareuse, qui donne l’air rapin, vous avez cru pouvoir impunément vous habiller comme des bourgeois, et voilà qu’à force de ressembler aux bourgeois, vous êtes des bourgeois vous-mêmes, aussi bourgeois que le plus bourgeois des bourgeois.

madame jourdeuil.

Voyons, mon pauvre homme, calme-toi. À quoi sert que tu te tourmentes ? Ce qui est fait est fait.

margarot.

D’autant mieux qu’un bon traité avec dédit, un dédit de vingt mille francs, ma foi ! passé entre votre fils et moi, nous lie l’un à l’autre pour dix ans, et que les plus beaux discours du monde n’y changeraient pas une lettre… Du reste, je dois vous dire qu’Henri en a très bien pris son parti et qu’il ne veut plus entendre parler de son ancien métier… C’est si vrai, qu’il a rompu avec tous ses camarades… ainsi, tenez !… il y en a un… vous le connaissez peut-être ?… un Marseillais, une espèce d’original.

madame jourdeuil.

Franqueyrol ?

margarot.

Oui, c’est cela… Franqueyrol… Eh bien ! voilà