Page:Daudet - Trente ans de Paris, Flammarion, 1889.djvu/161

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donc pas ? C’est une plaisanterie… Taisoté galéjaïré… taisez-vous, vilain moqueur. » Mais d’être galéjaïré, cela n’exclut ni la bonté ni la tendresse. On s’amuse,  ! on veut rire ; et là-bas le rire va avec tous les sentiments, les plus passionnés, les plus tendres. Dans une vieille, vieille chanson de chez nous, l’histoire de la petite Fleurance, ce goût des Provençaux pour le rire apparaît d’une exquise façon. Fleurance s’est mariée presque enfant à un chevalier qui l’a prise si jeunette, la prén tan jouveneto se saup pas courdela, qu’elle ne sait pas agrafer ses cordons. Mais, sitôt le mariage, voilà le seigneur de Fleurance obligé de partir en Palestine et de laisser sa petite femme toute seule. Sept ans se sont passés, sans que le chevalier ait donné signe de vie, quand un pèlerin à coquille et longue barbe se présente au pont du château. Il revient de chez les Teurs, il apporte des nouvelles du mari de Fleurance ; et tout de suite la jeune dame le fait entrer, le met à table en face d’elle.

Ce qu’il advint entre eux alors, je puis