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Les aventures de Perrine et de Charlot

démarches. Dieu me permettra de vivre jusque-là. Nous le lui demanderons tous les jours. Bah ! je ne serai pas encore si vieille.

(Sa figure s’égaie.)
charlot, vivement.

Vous ne serez jamais vieille. Je ne veux pas. Tous ceux que j’aime doivent rester… pas vieux et beaux.

(Après une dernière caresse, Charlot s’échappe en courant.)

Je reviens tout de suite, cousine.

On part. Affectueusement accroché au bras de la bonne hôtesse, Charlot s’intéresse à tout ce qu’il voit dans les rues de Dieppe. Les passants suivent l’enfant du regard. Sa merveilleuse histoire est maintenant connue de tous. Voilà le port ! Qu’il apparaît dans une belle rumeur ! On décharge prestement un navire arrivé de la veille, et des matelots, criant et jurant un peu, courent dans toutes les directions. D’autres s’approchent de la rive à grands coups de rames. « Le Saint-Joseph, » doucement bercé par une brise qui vient de s’élever, demeure d’un calme souverain au milieu de cette agitation. Charlot le désigne avec fierté à la bonne hôtesse. « Quel navire ! Voyez, cousine, comme il est construit pour atteindre des pays lointains ! Car, vous ne pouvez vous figurer comme c’est loin de la terre de France mon cher pays de Canada. Et… » Charlot s’interrompt brusquement. Ses yeux tombent sur un groupe de matelots qui passent à gauche. Un rude gaillard, long et maigre, aux cheveux tout blancs, marche la tête basse au milieu d’eux. Il se redresse soudain. Charlot, le voyant mieux, frémit de tout son corps. Sa main, qui saisit celle de sa protectrice, est toute froide d’émotion.