Page:Daveluy - Michel et Josephte dans la tourmente, paru dans Oiseau Bleu, 1938-1939.djvu/131

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humide, obscur, vous paraissiez sans cesse… Vous me regardiez triste, inquiète ; tantôt aussi, vous sembliez courageuse, malgré tout, tantôt vous n’espériez plus rien… Et comme je rêvais de vous, la nuit, quand le sommeil, prenant pitié de mes misères, m’en enlevait la conscience pour quelques heures…

Oui, Mathilde, j’ai souffert, j’ai cruellement souffert, à quoi bon vous le cacher !… Vous me saviez impétueux, volontaire, attaché aux idées que je croyais justes et saines. Eh bien ! tout cela gisait sans force, brisé, anéanti… La défaite est dure, même aux cœurs les plus courageux, mon amie… même à ceux qui croient de plus en plus à la justice de la cause qu’ils ont perdue… Certains mauvais jours, bien-aimée, votre souvenir venait à son tour me blesser. Je me demandais ce que serait l’avenir auprès de vous. N’avais-je pas compromis peut-être à jamais, le bien-être matériel qui nous serait nécessaire ? Pourrai-je me résoudre à vous voir vivre près de moi, d’une vie besogneuse, difficile, et n’ayant qu’une modeste, trop modeste aisance… Mais bientôt je me redressais… Ma jeunesse s’indignait de ces craintes… Que ne pourrais-je pas tenter, au contraire, pour refaire cette fortune aux trois quarts perdue durant la tourmente… Votre amour, votre confiance, vos paroles d’encouragement me tiendraient sans cesse debout, en alerte…