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IBERVILLE ET SAINT-CASTIN

Qu’advint-il de ce beau projet ? Iberville nous l’apprend dans sa relation du 16 décembre 1692.

Le 22 septembre, les deux navires levaient l’ancre, puis, le cap de Gaspé doublé, gouvernaient vers l’île Saint-Paul. M. Jerpaus, qui y était mouillé, apprit à M. d’Iberville qu’il prendrait des pilotes à la baie Verte, où l’Envieux devait débarquer les provisions destinées à Villebon, mais ce dernier préférait les recevoir à Pentagoët. Le 24 octobre, on abordait à l’île des Monts-Déserts dans la baie de Pentagoët. Immédiatement le commandant envoyait prévenir le baron de Saint-Castin. Son canot étant à terre, ses gens virent paraître un bateau pêcheur à une portée de pistolet. C’est alors qu’apercevant les matelots français. Petitpas et Saint-Aubin dévoilèrent le complot d’assassinat contre Saint-Castin.

« J’appris d’eux, raconte Iberville, que, à Boston, ils se préparaient à revenir à Québec, au printemps suivant, avec 12 frégates de 50 à 24 canons ; et 3.000 hommes de guerre, y compris les Sauvages alliés, par le chemin d’Orange »  3.

Iberville constata l’impossibilité de prendre Pemquid cette année-là. Il se borna donc à croiser sur les côte : « Ne voyant pas bien, monseigneur, de pouvoir réussir à Pemquid, ni à Pescadouet, et ne pouvant mener les sauvages plus loin à cause de leurs familles, nous jugeâmes plus à propos d’aller croiser le long des côtes anglaises et de pénétrer dans les rades où ils se méfiaient le moins. Pour cela, nous partîmes des Monts-Déserts, le 11 novembre, les Sauvages ne nous ayant joints que les 6 et 7 du mois ; 160 hommes que M. de Saint-Castin mène en trois heures de Pemkuit, où il fatiguera la garnison de ce fort et le prendra, s’il le peut, dans l’hiver ».
Iberville, sans doute le plus grand homme de guerre qu’ait connu le Canada, rendait un hommage précieux à Saint-Castin : « M. de Saint-Castin est un homme de mérite qui a un grand crédit sur l’esprit des sauvages, fort porté pour le service du roi, qui les retient dans notre patri contre toutes les misères qu’ils souffrent d’aller en guerre, n’ayant pas facilement leurs commodités de Québec, fort éloigné. Les Anglais leur font des offres considérables pour avoir la paix, aussi bien qu’au sieur de Saint-Castin pour les y amener M. de Villieu leur a donné tous les présents du roi : ce qui leur a été d’un grand secours, surtout de la poudre dont ils manquent : ils eussent bien souhaité avoir des fusils et sont résolus à donner des marques de leur fidélité aux Français dans toutes les occasions qui se présenteront : M. de Villieu reçut là toutes les provisions et les chargea dans la barque du sieur de Saint-Castin et partit comme nous, le 11 novembre ».

Le Moyne d’Iberville, élevé dans les bois canadiens, appréciait à sa valeur un personnage tel que Saint-Castin. Il comprenait qu’avec cet homme si au courant