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LE BARON DE SAINT-CASTIN

Labaig administrait les biens depuis 1672, en vertu d’une procuration.

Le juge du Sénéchal prétendit ignorer l’existence de tout titre ou inventaire au sujet de cet héritage. Saint-Castin demanda des lettres monitoires contre le possesseur de ces documents, et Labaig l’aida obligeamment dans ces procédures. Les deux beaux-frères s’entendaient le mieux du monde. Mais l’affaire n’avançait pas, Saint-Castin s’impatientait et tâchait, en se renseignant de droite et de gauche, de hâter le cours de la justice. Il en apprit assez pour obtenir de Labaig l’aveu qu’il avait eu l’inventaire entre les mains. Le bon apôtre avait même signé en 1675, « à cause de l’absence du baron de Saint-Castin », le dénombrement des biens de Jean-Jacques d’Abbadie.

La mauvaise foi, la malhonnêteté de l’administrateur éclataient au grand jour. Saint-Castin demanda à être cru sur son serment, pour la somme de 30 000 livres, évaluation de sa part dans la succession. C’est alors que Labaig montra son savoir-faire.


Saint-Castin entretenait, depuis son arrivée en France, une correspondance suivie avec le ministre Pontchartrain, qui le consultait sur toutes les questions relatives à l’Acadie. Nous l’avons vu à propos de Martin Chartier. On le priait encore de fournir des renseignements à la commission chargée de délimiter les frontières de la colonie 25. Il était le grand spécialiste de ces questions.

Les affaires d’Acadie prenaient une mauvaise tournure. Aussi le ministre, sachant dorénavant à quoi s’en tenir, comprenait-il combien la présence de Saint-Castin s’imposait dans cette région. Il voulait l’y renvoyer sans retard et, désireux de le soustraire aux vexations des gouverneurs de Port-Royal, il le nommait, en 1703, « Lieutenant de Roi au gouvernement de Pentagoët ». Saint-Castin devait s’embarquer à la fin de l’année, mais non sans avoir réglé ses affaires personnelles. Pontchartrain communiquait donc à M. de Gassion, premier président au Parlement de Pau, l’ordre du roi de juger l’affaire au plus vite 26.

Assuré de se débarrasser à brève échéance de son beau-frère, Labaig reprit espoir. Ne suffisait-il pas de retarder les procédures pour éviter tout jugement avant