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LE BARON DE SAINT CASTIN

d’outre-mer, il utilisait les nombreux bateaux de pêche venus dans ces parages, ou bien des irréguliers, flibustiers ou corsaires. Si le baron n’eut pas de navires en propre (ce qu’il faudrait démontrer), il ne manquait pas de moyens de transport.

Quand ils lui faisaient défaut du côté de la France, il en trouvait en Nouvelle-Angleterre. C’est là un aspect délicat de son histoire, car on lui a reproché ses contacts avec les Anglais. Qu’il nous suffise de marquer ici que Saint-Castin bornait ces relations strictement au commerce et que sa fidélité à la France, sur les points essentiels, ne fléchit jamais. La cour de Versailles, pour des raisons mercantiles, n’établissait aucune distinction entre les faits de guerre et les faits de commerce, mais la nécessité de vivre autorisait notre baron à faire fi de cette doctrine par trop sévère. En outre, il avait perdu son titre d’officier français en devenant chef abénaquis. Cette dernière qualité l’obligeait à pourvoir à la subsistance de sa tribu par les moyens disponibles. Et puis la France était mal venue de formuler des exigences, elle qui laissait les siens crever de faim en Acadie.


Saint-Castin avait vu dès le début que compter sur la France, c’était courir à de cruels déboires. Non seulement il n’avait rien à attendre du gouvernement, il avait tout à craindre de ses vagues représentants, non moins que des autres Français de la colonie. Chacun cherchait uniquement son intérêt personnel et, pour l’atteindre, était prêt à tout. La sombre histoire des Latour et celle des Le Borgne, — tissues de trahisons, de vols et de meurtres, — suffisaient à renseigner Saint-Castin.

Il se tenait loin de tout cela, faisant sa vie dans le secret parmi les Abénaquis. Plus tard, il ne se refusera pas à prêter l’aide qu’on lui demandera. Cela fait, il rentrera dans sa retraite.


— VII —


Pentagoët. — Où vivait-il ? Saint-Castin suivait les sauvages dans leurs pérégrinations, à la recherche des fourrures. Il avait un pied-à-terre à Pentagoët, poste abandonné par les boucaniers hollandais, immédiatement après l’attaque de 1674. Revenus au printemps de 1676, ils en étaient tout de suite chassés par les gens de la