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LE BARON DE SAINT-CASTIN

bons traitements qu’il a reçeus en France, ce qui ne peut manquer de faire un bon effect sur l’esprit de ces Sauvages et qui les consolera de la perte de son camarade qui est mort de la petite vérole à Niort » 15.


Le roi élaborait un projet, magnifique dans les bureaux de Versailles ou sous les tentes de Mons. Les sauvages constitueraient toute l’armée. Malgré les circonlocutions, telle était bien l’intention du roi. Il s’annexait les indigènes sans plus de cérémonie et il leur désignait des officiers. Villebon, écrivait-il, « pourra s’aller mettre à la teste desdits Canibats avec le Sr de Portneuf comme son lieutenant, quatre ou cinq officiers réformez entretenus en Canada et quelques Canadiens qui seront nommez et choisis par ledit Sr de Frontenac au nombre qu’il trouvera à propos jusques à celuy de quarante ».

En réalité, peu d’officiers combattirent avec les Abénaquis et aucun ne resta chez eux plus que le temps d’une brève campagne. Quelques Canadiens envoyés à Villebon l’abandonnèrent 16.

Villebon n’intervint jamais directement chez les indigènes. Il n’avait pas trop de ressources pour son propre fort. Et puis, étant canadien, il avait une conception plus juste que les commis de Versailles des relations avec les sauvages. Ceux-ci ne se considéraient pas comme les sujets du roi et, par conséquent, n’en acceptaient pas les ordres. Ils étaient des alliés, dont il fallait marchander la collaboration. Ils avaient leurs chefs de guerre, ils n’avaient que faire des officiers français. Enfin, Saint-Castin représentait la France chez eux. Ils n’auraient pas aisément souffert qu’un blanc supplantât le Français devenu un des leurs.

Le roi le prenait de bien haut. Si les Indiens ne réalisaient pas l’espoir mis en eux, on leur enlèverait les officiers 17.


Avec l’armée constituée comme le prévoyaient les instructions du camp de Mons, Villebon devait battre à plates coutures une colonie qui venait, en un tournemain, d’équiper trente-quatre navires, montés de 2 300 soldats en vue de l’attaque contre Québec.

Dans la capitale de la Nouvelle-France, où Villebon se rendit au retour de France, Frontenac sentit tout