Page:Davray-Rigal - Anthologie des poètes du Midi, 1908, éd2.djvu/23

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Ah ! comment tout entier ne t’ai-je pas suivie ?
Quel devoir me retient ! Qu’ai-je à faire et pourquoi ?
N’as-tu pas emporté la raison de ma vie,
Et n’est-ce pas mourir que d’être absent de soi ?

Adieu. Je te l’ai dit ce mot profond, si triste,
Et des pleurs tout à coup m’en reviennent aux yeux.
Car à tous les départs je sais qu’un spectre assiste,
Que la mort est partout où se font des adieux !

Adieu. Toutes les fois qu’il frappe notre oreille,
Ce mot cruel, qu’on dit tout bas et sanglotant,
On craint que le malheur qui dormait ne s’éveille !
On sait qu’il vaudrait mieux se taire en se quittant.

Adieu. Ce mot nous dit : « Téméraires, tout passe ! »
Nous n’avions entre nous que notre volonté ;
Puisque nous y mettons le temps avec l’espace,
Dieu qui s’indigne y peut mettre l’éternité !

C’est une mort d’un temps, l’absence, et c’est un crime !
Sachons bien que c’est mal, et que nous tentons Dieu,
Quand l’âme, s’absentant de l’être qu’elle anime,
Avec un être aimé s’en va dans un adieu.

(L’Éternel Cantique.)