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MARIELLE.

Voyons, contez-nous donc ce bel exploit.

SAUVAGEOT.

V’là c’que c’est… Vous saurez donc qu’hier, 13 vendémiaire, à la tombée de la nuit, j’avais placé le petit Rousselot en faction près du château d’Ambert… où ce que je soupçonne qu’il se manigance des menées… qui pourraient bien… enfin, suffit… Pour lors, le petit Rousselot entend, comme qui dirait une bête, qui se glissait à travers les tilleuls… Il est très-brave le petit Rousselot… mais ça lui donne la colique… Il regarde en dessous, et il aperçoit… devinez quoi ?…

RAYMOND.

Un troupeau de moutons…

MARIELLE.

Ou quelque vache qui rentrait à l’étable…

SAUVAGEOT.

Ah ! ben oui… Il aperçoit un grand manteau qui marchait tout seul… Il crie : qui vive !… pour toute réponse, le grand manteau lui détache une satanée calotte qui lui fait voir trente-six chandelles… (Raymond et Marielle éclatent de rire.) Vous riez de ça… c’est bien risible… Je suis sûr que c’était quelque aristocrate déguisé.

Air : Du premier prix.
––––––Pour risquer cette impertinence,
––––––Il a profité de la nuit ;
––––––Nous avons tous crié vengeance  ;
––––––Cette aventure a fait du bruit :
––––––De nos lois ce manteau se joue,
––––––Frapper un homme en faction,
––––––C’est vouloir donner sur sa joue
––––––Un soufflet à la Nation.

Aussi, nous l’avons tous reçu ce soufflet-là…. Seulement, le petit Rousselot a gardé la fluxion une et indivisible.

RAYMOND.

Eh ! ben qu’est-ce que ça prouve tout ça ?

SAUVAGEOT.

Ce que ça prouve ?… ça prouve des horreurs !… ça prouve qu’un suspect est entré au château, mais, je soupçonne bien qui que ça peut être…et je n’en serais pas fâché que ça soye lui…

RAYMOND.

Qui ça, lui ?

SAUVAGEOT.

Pardine, sergent, le ci-devant seigneur du ci-devant château… Le ci-devant comte Anatole d’Ambert… un scélérat, un gueusard, il aura eu l’infomie de chercher à revoir sa mère…. ça n’a ni foi, ni loi, ces gens-là.