Page:De Lamennais - Paroles d'un croyant, 1838.djvu/33

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gnerez deux pièces de monnaie, et vous vivrez bien mieux, vous, vos femmes et vos enfants.

Et ils le crurent.

Il leur dit ensuite : Vous ne travaillez que la moitié des jours de l’année ; travaillez tous les jours de l’année, et votre gain sera double.

Et ils le crurent encore.

Or, ils arriva de là que la quantité de travail étant devenue plus grande de moitié, sans que le besoin de travail fût plus grand, la moitié de ceux qui vivaient auparavant de leur labeur, ne trouvèrent plus personne qui les employât.

Alors l’homme méchant qu’ils avaient cru, leur dit : Je vous donnerai du travail à tous, à la condition que vous travaillerez le même temps, et que je ne vous payerai que la moitié de ce que je vous payais ; car je veux bien vous rendre service, mais je ne veux pas me ruiner.

Et comme ils avaient faim, eux, leurs femmes et leurs enfants, ils acceptèrent la proposition de l’homme méchant, et ils le bénirent ; car, disaient-ils, il nous donne la vie.

Et, continuant de les tromper de la même manière, l’homme méchant augmenta toujours plus leur travail, et diminua toujours plus leur salaire.

Et ils mouraient faute du nécessaire, et d’autres s’empressaient de les remplacer, car l’indigence était devenue si profonde dans ce pays que les familles entières se vendaient pour un morceau de pain.