Page:De Pisan - Œuvres poétiques, tome 1.djvu/285

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Ne je ne pense a autre riens nulle heure ;
Mais s’a present m’en vois, trés belle née,
Le corps s’en va, mais le cuer vous demeure.

Et loings de vous vivray en grief martyre,
Ne ma doulour ne sera ja finée
Jusqu’au retour, car riens ne puet souffire
A mon vray cuer, n’avoir bonne journée
Se ne vous voy ; soiez acertenée,[1]
Belle plaisant pour qui mon penser pleure,
Ou que je voise, et y fusse une année,
Le corps s’en va, mais le cuer vous demeure.

Si ne vueilliez nul autre ami eslire
Ne m’oublier, car soir ne matinée,
Ne heure du jour, vo beauté ou me mire
Et vo doulceur parfaitte et affinée
N’oblieray, si ne soit ja finée
L’amour de nous, quel que soit la demeure ;
De vous me pars, belle et bien atournée,[2]
Le corps s’en va, mais le cuer vous demeure.

Je prens congié celle a qui j’ay donnée
Toute m’amour ; de cuer plus noir que meure
Vous di a Dieu, ma joye entérinée,
Le corps s’en va, mais le cuer vous demeure.



XXV[3]


Or soiez liez, jolis et envoisiez,
Vrais fins amans, puis que May est venu,
Voz gentilz cuers gaiement esleesciez ;

  1. XXIV. — 13 B s. en certenée
  2. — 23 B b. aournée
  3. XXV. — Manque dans B