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famille que celle des maris qui, ne faisant pas une si ordinaire résidence entre les domestiques, ne peuvent pas par conséquent les adresser si aisément à la vertu. À cette considération, Salomon en ses Proverbes fait dépendre le bonheur de toute la maison, du soin et industrie de cette femme forte qu’il décrit.

Il est dit au Genèse qu’Isaac, voyant sa femme Rébecca stérile, pria le Seigneur pour elle, ou, selon les Hébreux, il pria le Seigneur vis-à-vis d’elle, parce que l’un priait d’un côté de l’oratoire et l’autre de l’autre : aussi l’oraison du mari faite en cette façon fut exaucée. C’est la plus grande et plus fructueuse union du mari et de la femme, que celle qui se fait en la sainte dévotion, à laquelle ils se doivent entreporter l’un l’autre à l’envi. Il y a des fruits, comme le coing, qui pour l’âpreté de leur suc ne sont guère agréables qu’en confiture ; il y en a d’autres, qui pour leur tendreté et délicatesse ne peuvent durer, s’ils ne sont aussi confits, comme les cerises et abricots. Ainsi les femmes doivent souhaiter que leurs maris soient confits au sucre de la dévotion, car l’homme sans dévotion est un animal sévère, âpre et rude ; et les maris doivent souhaiter que leurs femmes soient dévotes, car sans la dévotion la femme est grandement fragile, et sujette à déchoir ou ternir en la vertu. Saint Paul a dit que « l’homme infidèle est sanctifié par la femme fidèle, et la femme infidèle par l’homme fidèle », parce qu’en cette étroite alliance du mariage, l’un peut aisément tirer l’autre à la vertu. Mais quelle bénédiction est-ce, quand l’homme et la femme fidèles se sanctifient l’un l’autre en une vraie crainte du Seigneur !