Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/313

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dire qu’un homme soit méchant, sans danger de mentir ; et tout ce que nous pouvons dire, s’il faut en parler, c’est qu’il fit une telle action mauvaise, que sa vie fut méchante en tel temps ; actuellement il fait mal, mais on ne peut tirer nulle conséquence d’hier à aujourd’hui, ni d’aujourd’hui au jour d’hier, et moins encore du jour présent au lendemain. Il faut accorder toute cette délicatesse de conscience avec la prudence qui est nécessaire pour se garantir d’une autre extrémité où se jètent ceux qui, pour éviter la médisance, donnent des louanges au vice. Si donc une personne est sujette à médire, ne dites pas en l’excusant, qu’elle est libre, franche et sincère ; si une autre paroît manifestement vaine, n’allez pas dire qu’elle a le cœur noble et les manières propres. N’appelez pas les privautés dangereuses, des simplicités et des naïvetés d’une âme innocente ; ne donnez pas à la désobéissance le nom de zèle, ni à l’arrogance celui de générosité, ni à la volupté celui d’amitié. Non, Philothée, il ne faut pas en fuyant la médisance favoriser les autres vices, ni les flatter, ni les entretenir ; mais l’on doit dire rondement et franchemens qu’un vice est un vice, et blâmer ce qui est blâmable : ce sera indubitablement glorifier Dieu, pourvu qu’on observe les conditions suivantes.