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Les Délices

formé dans le déſert, n’en être jamais ſorti, & être fait pour y reſter toujours.[1]

La perſécution a ſes bornes, ainsi que toutes les choſes du monde. Les verges, dont la providence s’ëtoit ſervi pour éprouver Lambert, furent jétées au feu. L’autorité ſouveraine paſſa en d’autres mains. Le Proſcrit fut rapellé & mis en liberté ; l’Intrus ſe proſcrivit, & s’exila lui-même : le Paſteur ſut rendu à ſon Troupeau ; l’équitable Miniſtre, à un Prince autant pieux, & éclairé, que magnanime ; Lambert remonta ſur ſon Siége, & reprit ſa place dans le Conſeil de ſon Souverain.[2]

  1. Saint Lambert avoit paru avec éclat, non ſeulement à la Cour d’Auſtraſie ſous le Regne de Sigebert II. & de Childeric, mais encore en celle de Neuſtrie ou de Paris ſous le Regne de Clovis II.

    Après la mort de ce dernier, la Couronne de Neuſtrie, qui ſuivant les Loix de la Nation, apartenoit à Childeric Roi d’Auſtraſie, frere puiſné de ce Prince, fut miſe ſur la tête de Thierri ſon cadet, ſous le nom duquel Ebroin Maire du Palais gouverna pendant quelque tems le Roïaume ; mais la tirannie de ce Miniſtre engagea la Nobleſſe, à le reléguer dans le Monaſtére de Luxeuil au Comté de Bourgogne.

    Thierri fut traité à peu près de la même maniere. On lui coupa les cheveux ; on l’enferma dans le Monaſtére de ſaint Denis, & Childeric ſon aîné Roi d’Auſtraſie, fut proclamé Roi de Neuſtrie.

    Celui-ci fut quelques années après aſſaſſiné par un Gentilhomme François, & le déſordre, dans lequel ſa mort mit les Roïaumes de Neuſtrie & d’Auſtaſie, rendit la liberté à Ebroin, qui aiant repris ſa place de Maire du Palais de Thierri, auquel la Couronne de Neuſtrie avoit été renduë, engagea Dagobert Roi d’Auſtaſie, à exiler ſaint Lambert, & à donner ſon Siége Épiſcopal à un nommé Faramond qui le tint ſept ans ; pendant leſquels ſaint Lambert ſe retira dans l’Abaïe de Stavelot, où il pratiqua la vie monaſtique, d’une maniére exemplaire.

    V. l’Hiſtoire de France de Mezerai & de Daniel en la vie de Clotaire III. de Childeric & de Thierri II. & les quatre Écrivains cités de celle de ſaint Lambert, Fiſen, Foullon & Boüille.

  2. Après le décès de Dagobert, qui regna 7. ou 8. ans en Auſtraſie, le peuple de ce Roïaume, pour ne point tomber ſous la puiſſance tirannique d’Ebroin, qui ſous le nom de Thierri gouvernoit deſpotiquement celui de Neuſtrie, au lieu de transférer la Couronne à Thierri, qu’elle regardoit naturellement, élut deux Gouverneurs, ou Ducs, Pepin, ſurnommé de Herſtal, petit fils de Pepin de Landen, dont j’ai parlé en la Note [a] p. 29. & Martin ſon couſin, auxquels il confia le pouvoir ſouverain.

    Martin étant mort, Pepin resta ſeul Gouverneur du Roïaume d’Auſtraſie, & devint en peu de tems de celui de Neuſtrie, pendant le Regne de Thierri II, auquel il ne laiſſa de même, qu’à Clovis III. Childebert III. & Dagobert II. que le nom de Roi & les honneurs extérieurs atachés a la Couronne.

    Aiant été informé du mérite de ſaint Lambert, il le fit ſortir du Monaſtére de Stavelot, & le rétablit ſur ſon Siége, que l’intrus Faramond abandonna. Il l’apella à ſa Cour qu’il tenoit à Herſtal, d’où il gouvernoit