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Du Païs de Liége.

L’on ne doit donc point s’étonner, que tous les Hiſtoriens du Païs, à l’exception d’un ſeul, ſe ſoient réunis à dire que ce n’eſt point aſſés de lui donner le glorieux nom de Reſtaurateur de la Patrie, & que celui de Fondateur lui eſt dû à juſte titre : l’on doit même excuſer celui qui a mieux aimé reculer de trois Siécles la fondation de la Ville de Liége, que d’en donner l’honneur à Hubert. Ce zèle a pour fondement les grandes qualités de Notger. Quel mortel en a jamais tant réuni en ſa perſonne !

Prince, ſevére, & équitable. Evêque auſſi ſavant que pieux. Sage politique & ferme dans ſes entrepriſes. Capitaine vif & non moins prudent qu’impetueux. Maître

    Ainſi Anselme, qui écrivit peut-être 50 ou 55 ans après le décès de Notger, qu’il pouvoit avoir vû, étoit parfaitement inſtruit, ſi c’étoit ce Prélat, qui le premier avoit fait ſermer de Murs la Ville de Liége, il reſte à voir s’il le dit, ou quelque choſe qui puiſſe le faire préfumer.

    Omnia apud nos, tam interiùs quàm exteriùs melioravit. Eccleſiam S. Mariæ ſanctique Lamberti ædificiis latioribus ampliavit, ornamentis ditioribus decoravit, clauſtra ac demoratum & officinarum ædificia renovavit, Urbem muris dilatavit.

    Gilles d’Orval ſe ſert de termes, qui ſignifient la même choſe que ces derniers. Clauſtrum exterius ejuſdem Eccleſiæ S. Martini, inciſo colle Publicè Montis, triplici Vallo & Muro, cum Propugnaculis & Turribus ſublimibus communivit, & eandem Muri & Turrium munitionem, circà ambitum Civitatis, ſuà longitudine & latitudine, ſicut adhuc hodie videtur, perduxit.

    Il n’y a rien là, qui puiſſe induire à penſer que la Ville, qui avoit été bâtie par S. Hubert, n’étoit point fermée de Murs. Tout ce que l’on peut conclure des paroles de ces deux Ecrivains, eſt que dans l’intervalle de trois Siécles, qui s’étoient écoulés, depuis la fondation de la Ville, juſqu’au Pontificat de Notger, le nombre des Habitans s’etoit ſi conſidérablement augmenté, que la Ville n’étant pas aſſés ſpacieuſe pour les contenir, ils avoient été obligés de ſe loger aux environs, & que Notger joignit ces Logemens à la Ville, avec laquelle ils ne formérent plus qu’un ſeul tout, qu’il fit entourer de Murs, & fortifier de Tours & de Foſſés.

    Cette réflexion, qui ſe préſente naturellement à l’eſprit avoit frapé Fiſen avant moi. Après avoir raporté les faits, dont parle Gilles d’Orval & preſque dans les mêmes termes : il s’explique ainſi. Jam primùm Urbem muris cinctam Lipſius putat. Prolatum ego dumtaxat Pomœrium arbitror, clauſaque munimentis à Notgero Collegia, Cœnobiaque, quæ ab urbe condita, in ſuburbanis Præſules extruxerant.

    Je ſuis en cela de ſon avis, à l’exception de la ſignification, qu’il donne à Pomœrium. Ce mot, ſelon Robert Etienne & tous des meilleurs Auteurs des Dictionaires Latins, ſignifie l’eſpace de terrein, tant au dehors, qu’au dedans des murailles d’une Ville, ſur lequel il eſt défendu de bâtir.

    Cela étant, ſupoſé que l’on eût bâti, comme il est très-vraiſemblable, au dehors des Murs de la Ville, tout autour de l’eſpace mis en réſerve, comment auroit-on pû faire pour étendre cette eſpace autour des Faux-bourgs ?

    N’eſt-il pas plus naturel de penſer que lorſqu’ils furent joints à la Vil-