Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/218

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En 1840, je rencontrai les Corbeaux pour la première fois, dans la vallée de la rivière Grosse-Corne, grand tributaire de la Roche-Jaune. En ma qualité de Robe-Noire, ils me reçurent avec toutes les démonstrations du plus grand respect et de la joie la plus sincère. J’avais avec moi une provision d’allumettes chimiques dont je me servais pour allumer ma pipe et le calumet employé au Grand Conseil. L’action de ces allumettes les surprit beaucoup  ; ils n’en avaient jamais vu. On en parla bientôt dans toutes les loges, comme d’un feu mystérieux dont j’étais porteur et je fus regardé comme le plus grand homme de médecine qui eût jamais visité la tribu. Tous les égards me furent témoignés  ; on m’écouta avec la plus-étonnante attention. Avant mon départ, les chefs et les principaux guerriers, qui s’étaient réunis en conseil, me prièrent de leur laisser quelques-unes de mes allumettes. Ignorant les idées superstitieuses qu’ils y attachaient, je m’empressai de leur en distribuer, me réservant seulement la quantité nécessaire pour mon voyage.

Je visitai les mêmes Corbeaux en 1844. La réception qu’ils me firent encore fut des plus solennelles. Je fus installé dans la plus grande et la plus belle loge du camp. Tous les chefs et les guerriers s’habillèrent de leur mieux, chaussèrent leurs mocassins, ou souliers indiens, se mirent des guêtres, des chemises de peau de gazelle, le tout orné de perles de cristal, de piquants de porc-épic  ;