Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/237

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teur de camp dès qu’il eut atteint l’âge requis. Cet Indien attira sur lui l’attention des négociants du nord, dans le haut Canada ou territoire d’Hudson. L’étroite liaison qu’il y forma parmi les blancs, jointe à sa finesse ou à l’adresse naturelle qu’il possédait à un haut degré, lui firent acquérir des connaissances qui le distinguèrent, à son retour, au milieu de ses propres gens. Il avait aussi obtenu, par l’entremise d’un blanc, une quantité de poisons différents dont il apprit à connaître l’énergie. Tchatka était un être sans principes aucuns, fourbe, rusé et poltron. Quoique jeune et vigoureux, il se tenait toujours à l’écart dans les moments de danger ; tandis que ses guerriers se battaient dans la vallée contre les ennemis, il était, lui, assis sur une colline élevée d’où il pouvait tout observer. Il s’était fait initier aux roueries adroites des jongleurs ; mais il ne se livrait à ses incantations hypocrites qu’ayant à ses côtés un bon coursier sur lequel il s’enfuyait, en cas d’insuccès. Comme nous le verrons plus loin, il devint le chef de deux cent cinquante à deux cent quatre-vingts loges, soit environ douze cents guerriers. L’aveugle confiance qu’ils avaient dans leur guide paraît avoir été la cause de ses victoires à la guerre contre les Pieds-Noirs et les autres ennemis de sa nation.

Dès que Tchatka fut en position de donner plein essor à son mauvais génie, il mit tout en œuvre pour satisfaire son infernale ambition. Il sut calculer l’influence et l’ascendant qu’il exercerait