Page:De Smet - Lettres choisies,1875.djvu/32

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tour à tour son coup de casse-tête au poteau, il proclame les victimes que sa hache a immolées et montre avec ostentation les cicatrices des blessures qu’il a reçues.

Tel est encore aujourd’hui l’état de barbarie où vivent ces tristes Indiens. Ils n’entreront point en campagne sans avoir tâché d’attirer sur eux les faveurs du Grand-Esprit, soit par des rites diaboliques, soit par des jeûnes rigoureux ou par des macérations et d’autres peines corporelles. Ils vont même jusqu’à se couper les phalanges des doigts. Ajoutez aux profondes ténèbres du paganisme un débordement de mœurs effrayant, et vous aurez une faible idée de l’affreuse position de ces infortunées tribus. Eh bien, ces mêmes hommes me reçurent à bras ouverts, comme un envoyé du Grand-Esprit. Une vive émotion, peinte sur tous les visages, accompagnait en eux l’attention la plus respectueuse à mes discours, pendant que je les instruisais des grandes vérités de notre religion.

Un événement, qui survint deux jours après mon arrivée au Fort-Pierre, contribua beaucoup à augmenter en ma faveur la confiance des sauvages. Le voici tel qu’il se passa. La tribu des Ogallallas avait pénétré hostilement sur les terres de leurs voisins les Absharokés (ou Corbeaux), et leur avait livré bataille. Ceux-ci se défendirent en braves, mirent les agresseurs en déroute et leur tuèrent dix ou douze guerriers. Ils avaient