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DES DRAMES DE LESSING

à s’en lasser. Le genre mixte du drame ne s’introduit guère qu’à cause de la contrainte qui existe dans les tragédies : c’est une espèce de contrebande de l’art ; mais lorsque l’entière liberté est admise, on ne sent plus la nécessité d’avoir recours aux drames pour faire usage des circonstances simples et naturelles. Le drame ne conserveroit donc qu’un avantage, celui de peindre, comme les romans, les situations de notre propre vie, les mœurs du temps où nous vivons ; néanmoins quand on n’entend prononcer au théâtre que des noms inconnus, on perd l’un des plus grands plaisirs que la tragédie puisse donner, les souvenirs historiques qu’elle retrace. On croit trouver plus d’intérêt dans le drame, parce qu’il nous représente ce que nous voyons tous les jours : mais une imitation trop rapprochée du vrai n’est pas ce que l’on recherche dans les arts. Le drame est à la tragédie ce que les figures de cire sont aux statues ; il y a trop de vérité et pas assez d’idéal ; c’est trop si c’est de l’art, et jamais assez pour que ce soit de la nature.

Lessing ne peut être considéré comme un auteur dramatique du premier rang ; il s’étoit occupé de trop d’objets divers pour avoir un