Page:De Staël – De l’Allemagne, Tome 2, 1814.djvu/77

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
59
WALSTEIN, ET MARIE STUART.

tuer, Thécla demande à l’officier saxon qui en apporte la nouvelle tous les détails de cette horrible mort ; et quand elle a rassasié son âme de douleur, elle annonce la résolution qu’elle a prise d’aller vivre et mourir près du tombeau de son amant. Chaque expression, chaque mot, dans ces deux scènes, est d’une sensibilité profonde ; mais on a prétendu que l’intérêt dramatique ne peut plus exister quand il n’y a plus d’incertitude. En France, on se hâte en tout genre d’en finir avec l’irréparable. Les Allemands au contraire, sont plus curieux de ce que les personnages éprouvent que de ce qui leur arrive ; ils ne craignent point de s’arrêter sur une situation terminée comme événement, mais qui subsiste encore comme souffrance. Il faut plus de poésie, plus de sensibilité, plus de justesse dans les expressions pour émouvoir dans le repos de l’action, que lorsqu’elle excite une anxiété toujours croissante : on remarque à peine les paroles quand les faits nous tiennent en suspens ; mais lorsque tout se tait, excepté la douleur, quand il n’y a plus de changement au dehors, et que l’intérêt s’attache seulement à ce qui se passe dans l’âme, une nuance d’affectation, un mot hors de place frapperoit