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DE LA POÈSIE ALLEMANDE

et du lecteur. Ses élégies peignent l’effet de l’Italie sur toute son existence, cette ivresse du bonheur dont un beau ciel le pénètre. Il raconte ses plaisirs, même les plus vulgaires, à la manière de Properce ; et de temps en temps quelques beaux souvenirs de la ville maîtresse du monde donnent à l’imagination un élan d’autant plus vif qu’elle n’y étoit pas préparée.

Une fois il raconte comment il rencontra, dans la Campagne de Rome, une jeune femme qui allaitoit son enfant assise sur un débris de colonne antique. Il voulut la questionner sur les ruines dont sa cabane étoit environnée : elle ignoroit ce dont il lui parloit. Toute entière aux affections dont son âme étoit remplie, elle aimoit, et le moment présent existoit seul pour elle.

On lit dans un auteur grec qu’une jeune fille, habile dans l’art de tresser les fleurs, lutta contre son amant Pausias qui savoit les peindre. Goethe a composé sur ce sujet une idylle charmante. L’auteur de cette idylle est aussi celui de Werther. Depuis le sentiment qui donne de la grâce, jusqu’au désespoir qui exalte le génie, Goethe a parcouru toutes les nuances de l’amour.

Après s’être fait grec dans Pausias, Goethe nous conduit en Asie, par une romance pleine