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L’ALLEMAGNE MÉRIDIONALE

dans le nord, si les souverains avoient mis à ce genre d’étude un véritable intérêt ; cependant, il faut en convenir, les climats tempérés sont plus propres à la société qu’à la poésie. Lorsque le climat n’est ni sévère ni beau, quand on vit sans avoir rien à craindre ni à espérer du ciel, on ne s’occupe guère que des intérêts positifs de l’existence. Ce sont les délices du midi ou les rigueurs du nord qui ébranlent fortement l’imagination. Soit qu’on lutte contre la nature, ou qu’on s’enivre de ses dons, la puissance de la création n’en est pas moins forte, et réveille en nous le sentiment des beaux-arts ou l’instinct des mystères de l’âme.

L’Allemagne méridionale, tempérée sous tous les rapports, se maintient dans un état de bien-être monotone, singulièrement nuisible à l’activité des affaires comme à celle de la pensée. Le plus vif désir des habitants de cette contrée paisible et féconde, c’est de continuer à exister comme ils existent ; et que fait-on avec ce seul désir ? il ne suffit pas même pour conserver ce dont on se contente.