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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

un parti très-décidé à ramener l’ancien régime, et le général Pichegru en étoit un des principaux instruments.

Le directoire, en tant que conservateur de sa propre existence politique, avoit de grandes raisons de se mettre en défense ; mais comment le pouvoit-il ? Les défauts de la constitution, que M. Necker avoit si bien signalés, rendoient très-difficile au gouvernement de résister légalement aux attaques des conseils. Celui des anciens inclinoit à défendre les directeurs, seulement parce qu’il tenoit, quoique bien imparfaitement, la place d’une chambre des pairs ; mais, comme les députés de ce conseil n’étoient point nommés à vie, ils avoient peur de se dépopulariser en soutenant des magistrats repoussés par l’opinion publique. Si le gouvernement avoit eu le droit de dissoudre les cinq-cents, la simple menace d’user de cette prérogative auroit suffi pour les contenir. Enfin si le pouvoir exécutif avoit pu opposer un veto même suspensif, aux décrets des conseils, il se seroit contenté des moyens dont la loi l’eût armé pour se maintenir. Mais ces mêmes magistrats, dont l’autorité étoit si bornée, avoient une grande force comme faction révolutionnaire ; et ils n’étoient pas assez scrupuleux pour