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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

Bonaparte, dans la pyramide, se servit du langage oriental. « Gloire à Allah ! dit-il ; il n’y a de vrai Dieu que Dieu, et Mahomet est son prophète. Le pain dérobé par le méchant se réduit en poussière dans sa bouche. — Tu as parlé, dit le mufti, comme le plus docte des mullahs. — Je puis faire descendre du ciel un char de feu, continuoit Bonaparte, et le diriger sur la terre. — Tu es le plus grand capitaine, répondit le mufti, dont la puissance de Mahomet ait armé le bras. » Mahomet, toutefois, n’empêcha pas que sir Sidney Smith n’arrêta, par sa brillante valeur, les succès de Bonaparte à Saint-Jean d’Acre.

Lorsque Napoléon, en 1805, fut nommé roi d’Italie, il dit au général Berthier, dans un de ces momens où il causoit de tout pour essayer ses idées sur les autres : « Ce Sidney Smith m’a fait manquer ma fortune à Saint-Jean d’Acre ; je voulois partir d’Égypte, passer par Constantinople, et prendre l’Europe à revers pour arriver à Paris. » Cette fortune manquée paraissoit alors néanmoins en assez bon état. Quoi qu’il en soit de ses regrets, gigantesques comme les entreprises qui les ont suivis, le général Bonaparte trouva le moyen