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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

que crédit à la maxime infernale qui place la politique au-dessus de la morale, c’est qu’on a confondu les chefs de l’état avec l’état lui-même : or, ces chefs ont souvent trouvé qu’il leur étoit plus commode et plus avantageux de se tirer à tout prix d’une difficulté présente, et ils ont mis en principe les mesures que leur égoïsme ou leur incapacité leur ont fait prendre. Un homme embarrassé dans ses affaires établiroit volontiers en théorie, que d’emprunter à usure est le meilleur système de finances qu’on puisse adopter. Or, l’immoralité en tout genre est aussi un emprunt à usure ; elle sauve pour le moment, et ruine plus tard.

M. Necker, pendant son premier ministère, n’étoit point en mesure de songer à l’établissement d’un gouvernement représentatif ; en proposant les administrations provinciales, il vouloit mettre une borne à la puissance des ministres, et donner de l’influence aux hommes éclairés et aux riches propriétaires de toutes les parties de la France. La première maxime de M. Necker, en fait de gouvernement, étoit d’éviter l’arbitraire, et de limiter l’action ministérielle dans tout ce qui n’est pas nécessaire au maintien de l’ordre. Un ministre qui veut tout faire, tout ordonner, et