Page:De Staël – La Révolution française, Tome II.djvu/52

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
45
SUR LA RÉVOLUTION FRANÇAISE

contre la couronne. Quel décret cependant, que celui dont les prêtres étoient les victimes ! On livroit l’existence d’un citoyen à des dénonciations qui portoient sur ses opinions présumées. Que craint-on du despotisme, si ce n’est un tel décret ? Au lieu de vingt citoyens actifs, il n’y a qu’à supposer des courtisans qui sont actifs aussi à leur manière, et l’on aura l’histoire de toutes les lettres de cachet, de tous les exils, de tous les empoisonnemens que l’on veut empêcher par l’institution du gouvernement libre.

Un généreux mouvement de l’âme décida le roi à s’exposer à tout plutôt que d’accéder à la proscription des prêtres : il pouvoit, en se considérant comme prisonnier, donner sa sanction à cette loi, et protester contre elle en secret ; mais il ne put consentir à traiter la religion comme la politique ; et, s’il dissimula comme roi, il fut vrai comme martyr.

Dès que le veto du roi fut connu, l’on sut de toutes parts qu’il se préparoit une émeute dans les faubourgs. Le peuple étant devenu despote, le moindre obstacle à ses volontés l’irritoit. On vit aussi dans cette occasion le terrible inconvénient de placer l’autorité royale en présence d’une seule chambre. Le combat