Page:De Staël - Corinne ou l'Italie, Tome I, 1807.djvu/194

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
190
CORINNE OU L’ITALIE

différait de l’idée que son père s’était formée de celle qu’il lui convenait d’épouser ; et ce qu’il disait à Corinne se ressentait du trouble et de la contrainte que ces réflexions faisaient naître en lui.

Corinne ne s’en apercevait que trop bien ; mais il lui en aurait tant coûté de rompre avec lord Nelvil, qu’elle se prêtait elle-même à ce qu’il n’y eût point entre eux d’explication décisive ; et comme elle avait dans le caractère assez d’imprévoyance, elle était heureuse du présent tel qu’il était, quoiqu’il lui fût impossible de savoir ce qui devait en arriver.

Elle s’était entièrement séparée du monde pour se consacrer à son sentiment pour Oswald. Mais à la fin, blessée de son silence sur leur avenir, elle résolut d’accepter une invitation pour un bal où elle était vivement désirée. Rien n’est plus indifférent à Rome, que de quitter la société et d’y reparaître tour à tour, selon que cela convient : c’est le pays où l’on s’occupe le moins de ce qu’on appelle ailleurs le commérage ; chacun fait ce qu’il veut sans que personne s’en informe, à moins qu’on ne rencontre dans les autres un obstacle à son amour ou à son ambition. Les Romains ne s’inquiètent pas plus de la conduite de leurs compatriotes, que de celle