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CORINNE OU L’ITALIE

trop animées par le désir universel de plaire. Il lui trouvait beaucoup de noblesse et de réserve dans ses discours et dans son maintien, mais trop d’indulgence dans les opinions. Enfin Oswald était un homme séduit, entraîné, mais conservant au-dedans de lui-même un opposant qui combattait ce qu’il éprouvait. Cette situation porte souvent à l’amertume. On est mécontent de soi-même et des autres. L’on souffre, et l’on a comme une sorte de besoin de souffrir encore davantage, ou du moins d’amener une explication violente qui fasse triompher complètement l’un des deux sentimens qui déchirent le cœur. C’est dans cette disposition que lord Nelvil écrivit à Corinne. Sa lettre était amère et inconvenable ; il le sentait, mais des mouvemens confus le portaient à l’envoyer : il était si malheureux par ses combats, qu’il voulait à tout prix une circonstance quelconque qui pût les terminer.

Un bruit auquel il ne croyait pas, mais que le comte d’Erfeuil était venu lui raconter, contribua peut-être encore à rendre ses expressions plus âpres. On répandait dans Rome que Corinne épouserait le prince d’Amalfi. Oswald savait bien qu’elle ne l’aimait pas, et devait penser que le bal était la seule cause de cette nou-