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CORINNE OU L’ITALIE

Les peuples du midi sont plus aisément modifiés par leurs institutions que les peuples du nord ; ils ont une indolence qui devient bientôt de la résignation ; et la nature leur offre tant de jouissances, qu’ils se consolent facilement de celles que la société leur refuse. Il y a sûrement beaucoup de corruption en Italie, et cependant la civilisation y est beaucoup moins raffinée que dans d’autres pays. On pourrait presque trouver quelque chose de sauvage à ce peuple, malgré la finesse de son esprit : cette finesse ressemble à celle du chasseur dans l’art de surprendre sa proie. Les peuples indolens sont facilement rusés ; ils ont une habitude de douceur qui leur sert à dissimuler, quand il le faut, même leur colère ; c’est toujours avec ses manières accoutumées qu’on parvient à cacher une situation accidentelle.

Les Italiens ont de la sincérité, de la fidélité dans les relations privées. L’intérêt, l’ambition, exercent un grand empire sur eux, mais non l’orgueil ou la vanité : les distinctions de rang y font très-peu d’impression ; il n’y a point de société, point de salon, point de mode, point de petits moyens journaliers de faire effet en détail. Ces sources habituelles de dissimulation et d’envie n’existent point chez