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CORINNE OU L’ITALIE

— Je pensais que dans une maison où vous recevez tant de monde le titre de mon ami ne serait pas un motif d’exclusion. — Ne vous offensez pas, Mylord, reprit Corinne, croyez-moi, il faut que j’aie des raisons bien puissantes pour ne pas consentir à ce que vous désirez. — Et ces raisons, me les direz-vous ? reprit Oswald. — Impossible, s’écria Corinne, impossible ! — Ainsi donc, dit Oswald… et la violence de son émotion lui coupant la parole, il voulut sortir : Corinne alors, toute en pleurs, lui dit en anglais : — Au nom de Dieu, si vous ne voulez pas briser mon cœur, ne partez pas. —

Ces paroles, cet accent remuèrent profondément l’ame d’Oswald, et il se rassit à quelque distance de Corinne, la tête appuyée contre un vase d’albâtre qui éclairait sa chambre ; puis tout à coup il lui dit : — Cruelle femme, vous voyez que je vous aime, vous voyez que vingt fois par jour je suis prêt à vous offrir et ma main et ma vie, et vous ne voulez pas m’apprendre qui vous êtes ! Dites-le-moi, Corinne, dites-le-moi, répétait-il en lui tendant la main avec la plus touchante expression de sensibilité. — Oswald, s’écria Corinne, Oswald, vous ne savez pas le mal que vous me faites. Si j’étais assez insensée pour vous tout dire, si je