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CORINNE OU L’ITALIE

n’aimeraient-ils pas à généraliser leurs découvertes, à publier leurs aperçus. Ils ont dans le caractère quelque chose de prudent et de dissimulé, qui leur conseille de ne pas mettre en dehors, par les comédies, ce qui leur sert à se guider dans les relations particulières, et de ne pas révéler par les fictions de l’esprit ce qui peut être utile dans les circonstances de la vie réelle.

Machiavel cependant, bien loin de rien cacher, a fait connaître tous les secrets d’une politique criminelle ; et l’on peut voir par lui de quelle terrible connaissance du cœur humain les Italiens sont capables ! mais une telle profondeur n’est pas du ressort de la comédie, et les loisirs de la société, proprement dite, peuvent seuls apprendre à peindre les hommes sur la scène comique. Goldoni qui vivait à Venise, la ville d’Italie où il y a le plus de société, met déjà dans ses pièces beaucoup plus de finesse d’observation qu’il ne s’en trouve communément dans les autres auteurs. Néanmoins ses comédies sont monotones, on y voit revenir les mêmes situations, parce qu’il y a peu de variété dans les caractères. Ses nombreuses pièces semblent faites sur le modèle des pièces de théâtre en général, et non d’après la vie. Le vrai caractère de la gaieté italienne ce n’est pas